Géographie en terminale, cartographier pour identifier une situation : l’Europe, un espace à géométrie variable

05 / 05 / 2020 | Webmestre

Auteur : Germain Filoche, lycée professionnel Alfred Costes, Bobigny

Le texte ci-dessous est le récit d’une séance mise en œuvre par Germain Filoche en 2018 et 2019 avec une classe de terminale de la voie professionnelle au lycée des métiers Alfred Costes, à Bobigny. L’effectif de la classe est d’une vingtaine d’élèves. Les élèves ont déjà travaillé sur la représentation cartographique. Ils ont complété des cartes simples, localisé des repères géographiques, identifié des flux, lu différents types de cartes. Cependant, ils ont du mal à se saisir des enjeux méthodologiques et commettent régulièrement des erreurs d’interprétation des documents cartographiques. La lecture de la légende des figurés est souvent bâclée dès lors qu’elle est faite en autonomie. Cela pénalise les élèves lors des évaluations. Il convient donc de reprendre la méthodologie afin d’améliorer les capacités de lecture, d’utilisation des figurés et du vocabulaire géographique.

Mise en œuvre
Étape 1 : étude du document (45’)

L’enseignant annonce aux élèves qu’ils vont devoir construire en autonomie une carte pour représenter les différents espaces institutionnels européens. Avant la mise en activité, l’enseignant fait le point sur les acquis des élèves. Il les interroge sur le vocabulaire disciplinaire : États, Europe, Union européenne, Schengen, zone euro, frontières. Il vérifie qu’ils ont des éléments de connaissance de l’actualité (Brexit, crises, élections…). Les connaissances existent mais sont superficielles ou entremêlées : un travail de clarification est nécessaire en lien avec les exigences du programme.

L’enseignant projette au tableau un document issu du livre blanc de la Commission européenne portant sur la superposition des espaces et les différentes appartenances des États européens à une institution. La consigne est de transposer cette carte institutionnelle sous forme de carte simplifiée. Une étude du document est nécessaire.
L’enseignant demande aux élèves de faire un petit résumé de ce qu’est l’UE et la zone euro puis il demande à la classe d’identifier :
  Deux États qui font partie de l’UE mais pas de la zone euro,
  Deux États qui font partie de l’espace Schengen mais pas de l’UE,
  Deux États qui font partie de la zone euro mais pas de l’espace Schengen.

L’enseignant pointe la particularité du Royaume-Uni qui montre que ces espaces sont en construction et en évolution permanentes. Les élèves conviennent avec l’enseignant de la nécessité de simplifier le support institutionnel. L’enseignant demande quelle représentation donner à ce travail de simplification : une synthèse ou un croquis ? Quelles informations sélectionner ? En s’appuyant sur les réponses des élèves, il propose de retenir la forme du croquis et de sélectionner les informations qui mettent en évidence les saillances et les faiblesses du territoire européen. Les élèves font des propositions que l’enseignant note au tableau. Sont retenus l’UE, la zone euro et l’espace Schengen. Ces choix permettent en effet de montrer qu’une union politique entre les États n’implique pas des frontières ni une monnaie commune. L’enseignant demande quels repères géographiques pourraient être ajoutés. Les élèves proposent de localiser le nom des États et de leurs capitales.

Étape 2 : réalisation d’un travail cartographique préparatoire (20’)
L’enseignant distribue un fond de carte vierge imprimé sous format A3. Les élèves étant en classe de terminale, il souhaite s’appuyer sur les acquis des élèves. Il propose à chacun de cartographier comme il le souhaite sans donner aucune règle ou précision. L’enseignant écrit la consigne au tableau : Réaliser un croquis sur « L’Europe, un espace à géométrie variable ». Ce croquis représentera les États membres de l’Union européenne, de la zone euro et de l’espace Schengen en indiquant leurs noms et leurs capitales.

Les ressources disponibles dans la classe permettent aux élèves de positionner les noms des États européens et des capitales sur la carte. L’enseignant circule dans la classe afin de lever les blocages éventuels des élèves. L’élève doit se poser la question : comment faire se superposer plusieurs espaces sur une même carte ? Quels figurés utiliser, quelles couleurs, quelles variables visuelles ? Quel habillage cartographique ? Si les élèves ont déjà été confrontés au travail cartographique, c’est la première fois qu’ils doivent représenter une situation où se superposent des espaces et où le choix des figurés est questionné.

Étape 3 : analyse collaborative des travaux des élèves (15’)

L’enseignant rassemble les travaux des élèves et les présente à la classe. Sur chaque document, les élèves doivent justifier à l’oral les choix effectués. Émerge la question de la lisibilité du croquis. En effet, les élèves ont opéré des choix de figurés différents mais aucun n’est réellement satisfaisant, certains privilégiant la superposition de couleur, d’autres de hachures, brouillant ainsi les informations contenues.
Au fur et à mesure travaux des élèves, l’enseignant et les élèves conviennent qu’il faut diversifier les codes visuels afin de gagner en lisibilité.

Étape 4 : définition collaborative de figurés en s’appuyant sur la logique des élèves puis en vérifiant la validité au regard des principes cartographiques (15’)

Quels figurés retenir ? Les élèves font plusieurs propositions qui sont inscrites au tableau. L’enseignant guide les élèves et explique la nécessité d’établir un code cartographique. L’enseignant distribue un exemple de langage graphique (extrait de La géographie de Gerin-Grataloup, Nathan, 2019 ou dans un manuel de terminale de croquis). Le langage cartographique commence par la localisation des repères (noms des États et des capitales). Ensuite, il faut combiner des variables visuelles afin de différencier les États en fonction de leur appartenance. Pour assurer une efficacité visuelle de la carte, il faut combiner trois figurés graphiques qui peuvent se superposer : la couleur, la trame et la ligne en sont des exemples. Les élèves proposent de colorier en bleu les pays appartenant à l’UE afin de faire ressortir cette union et de respecter la couleur associée à cette union (drapeau). Ils proposent également d’utiliser la ligne afin de délimiter l’espace Schengen. Reste la possibilité d’établir une trame hachurée pour la zone euro. La classe discute du risque de perdre en lisibilité et propose d’utiliser un pictogramme comme le symbole de l’euro. L’enseignant écrit au tableau les visuels qui sont retenus et les met en lien avec le vocabulaire disciplinaire afin que les élèves puissent eux-mêmes établir une légende dans leur cartographie finale :
  les États membres de l’Union européenne sont coloriés en bleu (couleur du drapeau),
  les États membres de la zone euro sont identifiés par le pictogramme €,
  la frontière des États appartenant à l’espace Schengen est représentée par une ligne continue,
  les noms des États sont inscrits en lettres capitales,
  les noms des capitales des États de l’Union européenne sont inscrits en lettres minuscules.

Étape 5 : réalisation d’une carte finale (15’)
À partir de ce qui a été défini collectivement, les élèves réalisent au propre la carte des espaces européens. Une fois réalisée, l’enseignant demande aux élèves d’analyser le travail : peut-on comprendre la complexité des institutions en Europe en lisant votre carte ? L’enseignant compte sur un élève pour remarquer qu’un titre et une légende complète doivent être attribués pour constituer un travail de géographie. En cela, l’élève comprend l’importance de l’habillage de la carte.

Étape 6 : bilan des travaux (15’)
Chaque élève doit écrire une synthèse de ce qu’il a appris du territoire européen et ce qu’il a retenu de l’activité. Il est demandé aux élèves de construire une petite méthodologie des éléments indispensables pour construire une carte et d’expliquer ce qu’il a retenu des caractéristiques du territoire européen. Ce double volet permet à l’élève de conserver une trace écrite de la séance et de répondre à la problématique.

Avec cette progressivité dans la séance, l’élève apprend de ses erreurs dans la réalisation du travail cartographique et s’approprie l’outil cartographique propre à la discipline. Puisque l’élève aura lui-même construit une représentation cartographique, l’enseignant peut espérer que les élèves seront des lecteurs avisés de ce type de document.