La Première Guerre mondiale, une entrée défense pour questionner les élèves sur les enjeux mémoriels passés et présents

27 / 01 / 2022 | Webmestre

Auteure : Camille Jouve, lycée Henri Wallon, Aubervilliers.

Niveau : 1ere voie générale.

Partie du programme : Thème IV. La Première Guerre mondiale : « le suicide de l’Europe » et la fin des empires européens.

Temps imparti : 8 heures

Note d’intention sur la séquence :
La densité et la richesse des programmes ainsi que le calendrier resserré de fin d’année amène à traiter le thème IV de façon synthétique pour respecter les horaires impartis. Le choix est fait ici de dresser un tableau complet de la Première Guerre mondiale en insistant sur sa dimension diachronique (séance 1) puis d’approfondir un aspect relevant des « sorties de guerre », celui des enjeux mémoriels (séance 2), pour enfin ouvrir le sujet sur la question des commémorations actuelles de la Grande Guerre, entre rupture et continuité (séance 3) à travers une évaluation formative.
En ce qui concerne les outils pédagogiques, une place importante est donnée aux schémas qui constituent les traces écrites des élèves. Un panel de productions graphiques est ainsi utilisé, pour des questions de temps mais aussi pour en montrer, en cette fin d’année, les différentes dimensions.

Séance 1 : Schéma de synthèse reprenant les trois chapitres du thème IV consacrés à la Première Guerre mondiale

Rappel du B0 :
Chapitre 1. Un embrasement mondial et ses grandes étapes.

Chapitre 2. Les sociétés en guerre : des civils acteurs et victimes de la guerre.

Chapitre 3. Sortir de la guerre : la tentative de construction d’un ordre des nations démocratiques.

Note d’intention sur la séance :
Le parti pris a été de traiter les trois chapitres consacrés à la Première Guerre mondiale sous forme d’un vaste schéma de synthèse permettant de faire le tour de la question dans un temps raisonnable au vu des programmes et du calendrier scolaire. Il parait difficile en fin d’année de traiter un tel sujet de façon exhaustive. Des choix ont dû être faits, et le tableau de synthèse tend, avec l’adjonction d’une chronologie, vers les sorties de guerre. Il s’agit alors d’étudier la Grande Guerre comme un processus en la présentant dans sa dimension diachronique.

Problématisation de la séance :
Pour introduire la séance, la couverture de la revue Documentation photographique n° 8137, qui a pour titre La Première Guerre mondiale 1912-1923, est projetée au tableau. Les élèves sont invités à réfléchir au choix de la périodisation fait par l’auteur, Nicolas Beaupré, afin d’appréhender la Grande Guerre comme un processus long.
La problématique suivante est posée : Comment l’Europe est entrée et sortie de la Grande Guerre ?

Objectifs / contenus scientifiques :

Capacités et méthodes :
 S’approprier un questionnement historique.
 Identifier et nommer les périodes historiques, les continuités et les ruptures chronologiques.
 Identifier et expliciter les dates et les acteurs clefs des grands évènements.
 Nommer et localiser les principaux processus et phénomènes étudiés.
 Procéder à l’analyse critique d’un document selon une approche historique.
 S’exprimer de manière claire, argumentée, nuancée et posée / Contribuer à un travail collaboratif.

Déroulement de la séance :
1ere étape : Réactiver des connaissances
Pour introduire la séance, les élèves sont invités à remobiliser leurs connaissances sur la Première Guerre mondiale. Le travail effectué en classe de 3e en vue du brevet et l’intérêt suscité par la Grande Guerre font qu’ils ont souvent des acquis solides sur ce thème qu’il est aisé de réactiver.
Les élèves doivent ensuite classer les différents éléments pour distinguer ceux qui concernent le déclenchement de la guerre, son déroulement dans ses aspects militaires, dans sa dimension sociétale et enfin ses suites ; ce classement correspondant aux quatre parties du schéma de synthèse constitutif de leur cours.

2e étape : Pratiquer l’écoute active
Dans un deuxième temps, le professeur mène le récit de la Grande Guerre et les élèves sont sollicités pour prendre des notes. L’enseignant fait une démonstration en donnant les éléments de compréhension et de contexte tout en insistant sur les processus à l’œuvre et les différents acteurs. Lorsque cela est nécessaire, des documents sont projetés afin de servir d’illustration pour appuyer le propos et réactiver la curiosité et l’attention des élèves. Les points et évènements saillants sont notés au tableau par le professeur pour aider les élèves à la prise de notes.
Les nombreux PPO des 3 chapitres sont mis en valeur par des présentations orales faites en groupe par les élèves à partir du manuel et prévues en amont de la séance. Par la participation orale, la classe est ainsi amenée à s’associer au récit du professeur et à être partie prenante du cours.

3e étape : Compléter un tableau et une frise chronologique
A partir des notes prises au cours de l’écoute active, les élèves complètent le tableau et la frise chronologique. Il s’agit de reformuler ce qui a été compris lors de l’étape d’écoute active. Un code couleur est donné pour articuler les thèmes et leur périodisation afin de donner à voir, visuellement, la Grande Guerre comme un processus long dont font pleinement partie les entrées et les sorties de guerre.

Bilan de la séance :
Les élèves ont une vue d’ensemble de la Première Guerre mondiale. Les divers aspects de la guerre, ses différentes phases, ses retournements, ses nombreux acteurs et ses multiples enjeux sont explorés. Le schéma, comme attendu dans les programmes, tend vers la fin des empires européens et le « suicide de l’Europe » permettant ainsi aux élèves de saisir l’affaiblissement démographique, économique, diplomatique et politique du continent ainsi que la transformation et le traumatisme des sociétés. Les élèves seront alors en mesure d’aborder sereinement le premier thème du programme de terminal consacré aux « Fragilités des démocraties, totalitarismes et Seconde Guerre mondiale ».
L’approche combinant un schéma et une frise chronologique permet aux élèves d’appréhender la Grande Guerre dans sa dimension synchronique mais aussi diachronique. Les entrées et les sorties de guerre apparaissent comme des processus, des moments de transition entre la paix et la guerre et entre la guerre et la paix. Les bornes de 14-18, communément admises, sont repensées avec des « mises en guerre » antérieures à 1914 et des affrontements qui se poursuivent à l’Est après 1918. De même, l’évocation de la brutalisation et du poids des morts sur les vivants permet d’aborder la lente « démobilisation culturelle » des sociétés et des individus. Une réflexion qui sera approfondie dans la séance suivante consacrée à la commémoration des morts.
Enfin, les élèves sont en mesure d’apprécier les différentes approches historiographiques de la Grande Guerre leur permettant ainsi d’avoir une lecture globale du conflit. A travers les processus d’entrées et de sorties de guerre, ils abordent une histoire des relations internationales quand l’étude des différentes phases et fronts leur donne à voir une histoire militaire. La Première Guerre mondiale se fait aussi objet d’histoire sociale et culturelle à travers l’implication des civils. Ainsi, comme sous-tendu par les programmes, le tableau de synthèse réalisé par les élèves, permet une lecture de la guerre « par le haut » et « par le bas » ; double dimension qui sera étoffée lors de la deuxième séance consacrée aux enjeux mémoriels.

Ressources scientifiques :
 Beaupré Nicolas, Les Grandes Guerres (1914-1945), Coll Histoire de France, Belin, 2014.
 Beaupré Nicolas, La Première Guerre mondiale, 1912-1923, Documentation photographique n°8137, éditions CNRS, novembre 2020.
 Cabanes Bruno, « L’interminable sortie de la guerre », L’Histoire n°449, juillet-août 2018.
 Prost Antoine, Winter Jay, Penser la Grande Guerre. Un essai d’historiographie, Seuil, 2004.

Vous pouvez lire et/ou télécharger les documents de la séquence ci-dessous.

- Supports et outils pédagogiques pour les élèves :

1ere partie du schéma de synthèse : Entrer en guerre
2e partie du schéma de synthèse : Les combats, phases et fronts militaires
3e partie du schéma de synthèse : La mobilisation des sociétés
4e partie du schéma de synthèse : Sortir de la guerre

- Travaux d’élèves :

1e partie schéma production élève
2e partie schéma production élève
3e partie schéma production élève
4e partie schéma production élève
Schéma vue d’ensemble production élève

Séance 2 : Sortir de la guerre, commémorer les morts

Partie du programme :
Thème IV. La Première Guerre mondiale : « le suicide de l’Europe » et la fin des empires européens.
Chapitre 3. Sortir de la guerre : la tentative de construction d’un ordre des nations démocratiques.

Rappel du BO :

Note d’intention sur la séance :
Le choix est fait d’approfondir un aspect des « sorties de guerre », celui des enjeux mémoriels qui est ici cantonné à la commémoration des morts. Traiter la question sous cet angle parait pertinent en vue de la classe de terminale, notamment pour les élèves qui suivent la spécialité HGGSP, mais aussi en lien avec le thème du lien social abordé en EMC pendant l’année de première.

Problématisation de la séance :
Pour introduire la séance, les élèves sont invités à réfléchir à la notion de mémoire en lien avec celle d’histoire. La problématique suivante est posée : Quels sont les enjeux mémoriels des sorties de guerre ?

Objectif de la séance :
Permettre aux élèves de comprendre comment les individus, les sociétés et les États commémorent les morts de la Grande Guerre et entretiennent la mémoire du conflit.

Notions / contenus scientifiques :
Groupes porteurs de mémoire, lieux de mémoire, mémoire nationale.

Capacités et méthodes :
 S’approprier un questionnement historique.
 Procéder à l’analyse critique de documents selon une approche historique.
 S’exprimer de manière claire, argumentée, nuancée et posée / Contribuer à un travail collaboratif.
 Utiliser l’échelle appropriée pour étudier un phénomène / Mettre en œuvre une analyse multiscalaire / Réaliser des productions graphiques dans le cadre d’une analyse.

Déroulement de la séance :
1ere étape travail préparatoire sur documents :
Dans le cadre d’une activité différenciée, chaque élève travaille individuellement sur un dossier traitant d’un aspect mémoriel. Les ensembles documentaires, de complexité inégale, doivent faire l’objet d’une présentation rédigée respectant les critères d’analyse contenus dans la grille multiscalaire distribuée avec le dossier. Les élèves sont ainsi invités à réfléchir aux dispositifs et pratiques commémoratives, à leurs acteurs et à leurs enjeux mémoriels.
2e étape mise en commun :
Au sein d’un groupe, les élèves restituent à l’oral leur travail sur documents. Les analyses portant sur les différents dossiers sont mises en commun dans le tableau multiscalaire pour mettre en valeur les échelles d’action (sphère privée, locale, nationale…) et les différentes échelles mémorielles (individuelle, collective, nationale…).
3e étape tâche complexe :
Les élèves complètent un schéma multiscalaire qui constituera leur trace écrite dans l’optique de maitriser différents types de productions graphiques. Ils appréhendent alors toutes les dimensions de la mémoire depuis la sphère privée jusqu’aux enjeux internationaux. En articulant les différentes échelles entre elles et en saisissant leurs imbrications, les élèves s’approprient les mécanismes de construction d’une mémoire partagée et d’une mémoire nationale leur permettant ainsi de comprendre les enjeux mémoriels de la commémoration des morts.

Bilan de la séance :
Les enjeux mémoriels sont appréhendés dans leur pluralité et dans leurs inscriptions spatiales livrant ainsi un paysage mémoriel très dense à la fois physique et géographique mais aussi mental et symbolique.
Le deuil apparait comme une expérience intime à travers la figure de la mère endeuillée, mais qui participe d’une mémoire partagée avec une « mise en mémoire du conflit » à différentes échelles. Pour justifier le sacrifice, le culte du Soldat inconnu, pratique commune aux vainqueurs, cristallise toutes ces mémoires incarnant ainsi une mémoire nationale. Les élèves ont alors une vision « par le bas » et « par le haut » des enjeux et des pratiques mémoriels.
Une réflexion sur la mémoire des vainqueurs et celle des vaincus est aussi menée. A l’échelle de l’intime avec la comparaison entre la Pietà de Käthe Kollwitz et l’allégorie maternelle du monument aux morts d’Aubervilliers mais aussi à l’échelle internationale avec la mise en exergue de pratiques communes et ainsi d’une mémoire partagée entre vainqueurs dont le pendant est un vide mémoriel chez les vaincus.
Ce dernier aspect permet de donner de la profondeur historique à la question des mémoires et de faire une transition avec la séquence suivante consacrée aux commémorations de la Grande Guerre aujourd’hui.

Ressources scientifiques :
 Audoin-Rouzeau Stéphane, Prochasson Christophe (dir.), Sortir de la Grande Guerre. Le monde et l’après-1918, Tallandier, 2008.
 Beaupré Nicolas, Les Grandes Guerres (1914-1945), Coll Histoire de France, Belin, 2014.
 Beaupré Nicolas, La Première Guerre mondiale, 1912-1923, Documentation photographique n°8137, éditions CNRS, novembre 2020.
 Cochet François et Grandhomme Jean-Noël (dir.), Les Soldats inconnus de la Grande Guerre. La mort, le deuil, la mémoire, 14-18 Éditions, 2012.
 Winter Jay, Entre deuil et mémoire. La Grande Guerre dans l’histoire culturelle de l’Europe, Armand Colin, 2008.

Composition de l’ensemble documentaire :

  • Dossier A : Faire le Deuil
    Sculpture Pietà de Käthe Kollwitz (1937) / Chanson « Je cherche la tombe de mon p’tit gars » de Gaston Montéhus (1920).
  • Dossier B : Commémorer les morts là où ils ont vécu
    Monument aux morts de la ville d’Aubervilliers (1925) / Extraits de débats municipaux (1924).
  • Dossier C : Commémorer les morts là où ils ont perdu la vie
    Photographie du transfert de cercueils à l’ossuaire de Douaumont (1927) / Photographie aérienne actuelle de la nécropole de Douaumont.
  • Dossier D : Quand la Nation commémore ses morts, le culte du Soldat inconnu
    Photographies du transfert du Soldat inconnu et du dépôt de son cercueil (10, 11 novembre 1920) / Extrait du Petit Journal (12 novembre 1920).
  • Dossier E : Commémorer les morts des vainqueurs
    Tableau récapitulatif des transferts de Soldats inconnus de 1920 à 2004 / Carte postale du mémorial britannique de Thiepval (1924).
  • Dossier F : Commémorer les morts des vaincus
    Photographie aérienne du mémorial de Tannenberg (1933) / Extrait de Mémoires de Von Bülow (1930).

Vous pouvez lire et/ou télécharger les documents de la séquence ci-dessous.

Supports et outils pédagogiques pour les élèves :

Activités sur les documents
Grille d’analyse multiscalaire
Schéma multiscalaire

- Travaux d’élèves

Grille d’analyse multiscalaire réalisé par des élèves
Schéma multiscalaire réalisé par les élèves

Séance 3 : Les enjeux des commémorations de la Grande Guerre aujourd’hui

Partie du programme :
Thème IV. La Première Guerre mondiale : « le suicide de l’Europe » et la fin des empires européens.
Chapitre 3. Sortir de la guerre : la tentative de construction d’un ordre des nations démocratiques.

Rappel du BO :

Note d’intention sur la séance :
Toujours dans une perspective diachronique et en lien avec le programme d’EMC consacré au lien social, la troisième séance porte sur la question des commémorations de la Grande Guerre aujourd’hui. Cette séance prend la forme d’une évaluation formative. Il s’agit pour les élèves de poursuivre la réflexion menée sur les enjeux mémoriels dans les sorties de guerre en établissant les ruptures et les continuités avec les enjeux actuels tout en travaillant leurs capacités à réaliser des productions graphiques.

Objectif de la séance :
Permettre aux élèves de comprendre quels sont les enjeux mémoriels de la Grande Guerre aujourd’hui et en quoi ils sont facteurs de lien social.

Notions/ Contenus scientifiques :
Mémoire commune, mémoire conflictuelle, mémoire occultée, patrimoine.

Capacités et méthodes :
 Procéder à l’analyse critique de documents selon une approche historique.
 Identifier les continuités et les ruptures chronologiques.
 Mettre un évènement en perspective.
 Réaliser des productions graphiques dans le cadre d’une analyse.
 Justifier des choix, une interprétation, une production.

Déroulement de la séance :
Après avoir présenté les documents et relevé les différents enjeux mémoriels, les élèves doivent réaliser une production graphique qui mette en valeur les continuités et les ruptures de ces enjeux avec ceux des sorties de guerre. La forme prise par cette production est laissée à la libre appréciation des élèves qui ont eu l’occasion, tout au long de l’année, de se familiariser avec tout un panel de représentations graphiques.

Bilan de la séance :
En travaillant sur les continuités et les ruptures des enjeux mémoriels les élèves mesurent le poids de la Grande Guerre sur les sociétés un siècle plus tard. Ils constatent que les enjeux mémoriels s’inscrivent dans un contexte politique et social et que ces enjeux sont donc amenés à évoluer.
Les élèves perçoivent également le rôle d’une mémoire partagée pour renforcer la paix et/ou créer du lien social ou à contrario le poids d’une mémoire occultée dans les crispations d’une société.
Lors de la reprise et en guise de conclusion, un retour peut être fait sur le lien entre les derniers témoins de la guerre et les notions d’histoire et de patrimoine.

Supports et outils pédagogiques pour les élèves :
  Extrait d’une interview de l’historien Rémy Dalisson sur les commémorations du centenaire de la Grande Guerre, Le Monde, 11 novembre 2018.
  Extraits du discours de François Hollande du 7 novembre 2013 portant sur les commémorations de la Première Guerre mondiale.

Vous pouvez lire et/ou télécharger les documents de la séquence ci-dessous.

Commémorer 14-18 aujourd’hui Activité et documents